Quels sont les principaux abolitionnistes de l’esclavage en France ?

En 1848, la France abolit de manière définitive l’esclavage dans la métropole et dans les colonies. Enfin, cet acte abominable disparait de notre culture. Mais, pour y parvenir, il a fallu des changements de mentalité et un combat valeureux des abolitionnistes.

Qui étaient les principaux abolitionnistes de l’esclavage en France ? Dans la suite de l’article, je vous présente une liste d’une dizaine de personnes qui ont été des exemples sur le sujet.

Marquis de Condorcet (1743 – 1794)

nicolas condorcet

Nicolas de Condorcet est un personnage important des Lumières. Comme tous ces intellectuels, il multipliait les casquettes. Il est aujourd’hui reconnu comme un scientifique, un philosophe, un mathématicien, un éditeur et un homme politique. C’est tout ? Non !

Il est aussi un pionnier dans la lutte contre les discriminations. Ainsi, il a œuvré pour l’égalité entre les sexes et contre l’esclavage.

Il est l’auteur des « Réflexions sur l’esclavage des nègres ». Le titre dit tout. Il condamne l’esclavage et appelle à l’égalité des droits. En tant que membre de la Société des Amis des Noirs, il milite activement pour l’abolition et propose des réformes pour intégrer les Noirs affranchis dans la société française.

Car, oui, une grosse peur était de savoir ce que l’on ferait des anciens esclaves. On craignait qu’ils ne servent à rien à cause de leur manque de culture et d’intelligence… C’était un autre siècle !

Malheureusement pour Condorcet, il fait partie des Girondins et la Convention Nationale demande son arrestation. Un jour après son entrée en cellule, il meurt mystérieusement…

Je profite de cette présentation de Condorcet pour rappeler un fait important. Plusieurs personnes présentes dans ma liste ont vécu en 1848 et c’est tout à fait normal. L’esclavage a été aboli une première fois en 1794. Napoléon l’a rétabli à quelques endroits en 1802 pour assurer la pérennité de colonies, avant que l’abolition soit revotée (et totale), en 1848.

Olympe de Gouges (1748 – 1793)

olympe de gouges

Olympe de Gouges est restée dans toutes les mémoires. D’ailleurs, j’ai longtemps connu son nom plus que sa vie et j’imagine que vous êtes beaucoup à avoir eu le même rapport avec cette femme exceptionnelle.

Dramaturge, elle est restée dans l’histoire comme l’une des premières féministes. Bon, à l’époque, ce n’était pas une féministe avec des poils sous les bras criant « Liberté » dans une réunion universitaire. Talentueuse, elle a écrit la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne ».

Son travail de fervente abolitionniste de l’esclavage mérite d’être mieux connu. Dans son pamphlet « Réflexions sur les hommes nègres », elle critique l’injustice de l’esclavage et appelle à l’égalité des races.

Elle est une des rares femmes à s’engager publiquement dans ce combat.

En 1793, à 45 ans, elle est dévorée par la Révolution et intègre la liste de ces rebelles tués par plus forts, ou plus diaboliques, qu’eux. Condamnée à mort, elle passe sous la guillotine.

Victor Schœlcher (1804 – 1893)

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Victor Schœlcher est l’un des abolitionnistes les plus emblématiques de France.

Sous la Deuxième République, il joue un rôle majeur dans la promulgation du décret du 27 avril 1848, abolissant définitivement l’esclavage dans les colonies françaises.

Schœlcher est un homme de conviction qui consacre sa vie à lutter contre les inégalités et à promouvoir les droits des Noirs. Ses écrits et son action politique ont eu un impact considérable sur l’abolition.

Il ne fait pas partie des petits esprits narcissiques qui se réveillent quand l’abolition est presque actée. Dès 1830, il relate le quotidien horrible des esclaves et écrit plusieurs livres.

Il parle en connaisseur puisqu’il passe beaucoup de temps aux Antilles. Après l’abolition, il deviendra député de Martinique et de Guadeloupe.

Abbé Grégoire (1750 – 1831)

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L’Abbé Grégoire est un prêtre catholique qui a été un grand défenseur des opprimés.

Ainsi, il a œuvré pour le suffrage universel (masculin), l’abolition des privilèges, les droits des Noirs et des Juifs.

Il est notamment l’un des fondateurs de la Société des Amis des Noirs (en 1789) et milite pour l’égalité raciale et l’abolition de l’esclavage. En plus de la fin de l’esclavage, il souhaite des lois condamnant les discriminations contre les noirs et les métis. C’est presque un précurseur !

Ses discours passionnés à l’Assemblée nationale et ses écrits ont contribué à l’injustice de l’esclavage.

Il appelle à une lutte contre les négriers. Il précise qu’un négrier n’est pas que le monstre qui achète ou kidnappe des noirs pour les revendre autre part dans le monde, mais tous ceux qui participent au commerce. Il englobe les marins, les assureurs, les colons-planteurs… Bref, tous les complices ou tous ceux qui ferment les yeux sont coupables !

Jean-Baptiste Belley (1746 – 1805)

belley jean baptiste

Jean-Baptiste Belley est un homme noir. Il serait né au Sénégal avant d’être vendu à deux ans à un négrier qui l’a embarqué pour Saint-Domingue.

Sur place, son travail lui permet de racheter sa liberté. Nègre libre, il se fait surnommer Timbazé.

Il devient même militaire et participe à la guerre d’indépendance des États-Unis d’Amérique en intégrant les corps supplétifs de nègres libres. Cela vaut un autre surnom : Mars.

Il est ensuite capitaine d’infanterie française au moment de la Révolution. Oui, vous pouviez être un homme noir et occuper un poste d’officier en 1789. C’est ça la France !

Une fois député de Saint-Domingue. Il est l’un des premiers hommes noirs à siéger au Parlement français. En tant que membre de la Société des Amis des Noirs, il défend évidemment avec vigueur l’abolition de l’esclavage.

Le 11 février 1794, il prononce un discours historique à la Convention nationale en 1794 sur la liberté et le patriotisme.

Julien Raimond (1744 – 1801)

Julien Raimond est un autre homme noir libre originaire de Saint-Domingue. Toutefois, il n’a jamais été un esclave. Au contraire, il est issu d’un milieu aisé.

En réalité, il n’est pas noir, mais mulâtre. Le père de Julien Raimond est blanc, sa mère est noire.  Le terme est moche, mais il restera longtemps utilisé, notamment pour qualifier les Dumas.

Il rachète un terrain à Saint-Domingue et est donc un propriétaire terrien. Il connait donc les inégalités entre les blancs et les noirs, mais il est surpris de les vivre malgré son statut d’homme libre et riche ! En effet, la loi coloniale crée des différences de nature entre les couleurs.

Il entreprend alors une lutte contre ce qu’il appelle le « préjugé de couleur ». Cela semble presque minorer un racisme institutionnel et la pratique de l’esclavage.

En France, il écrit plusieurs mémoires et participe activement aux débats politiques pour l’égalité des droits. Il s’affiche même comme un porte-parole des antiesclavagistes devant la Convention Nationale.

Une fois la (première) abolition de 1794 signée, il revient à Saint-Domingue, se rapproche du célèbre Toussaint Louverture, et décède en 1801.

Louis Delgrès (1766 – 1802)

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Louis Delgrès est autre homme noir. Il est né libre et vit d’abord en Martinique puis à Tobago.

Il débute une carrière militaire et commence à prêcher pour l’abolition de l’esclavage après les premiers signes de révolte dans les colonies américaines, dont Haïti.

Il prend dans le même temps de l’ampleur dans le monde politique. Partisan de la Révolution, il quitte la Martinique pour la Dominique. En tant que républicain, il constate avec joie l’abolition de l’esclavage en 1794.

Tout change en 1802 quand Napoléon rétablit l’esclavage. Quand les troupes du consul (Napoléon ne deviendra empereur qu’en 1804) arrivent, il choisit le camp de la rébellion. Il est un chef de l’insurrection contre le rétablissement de l’esclavage par Napoléon en Guadeloupe en 1802.

N’oubliez pas qu’il est un homme libre et se bat pour les autres, pas pour éviter de finir lui-même en planteur !

Durant la bataille, ses hommes et lui se replient dans le fort de Basse-Terre. Ils sont pris. La seule option semble la reddition. Pas pour eux. Ils préfèrent mourir avec honneur que se rendre à ces sal… qui veulent rétablir l’esclavage.

Ils font tout péter. 300 hommes, dont Delgrès, se suicident à l’explosif et respecte ainsi la devise de la Révolution : « Vivre libre ou mourir ».

D’autres qui ont compté dans l’histoire de l’abolition de l’esclavage

En plus de quelques noms célèbres cités avant, beaucoup d’hommes et de femmes ont compté à leur manière pour lutter contre l’esclavage. Dresser une liste exhaustive serait impossible. Mais, pour vous donner quelques exemples variés, voici une sélection de noms et d’actes à retenir :

  • Claire Démar (1799 – 1833) : Féministe, elle a également été une critique de l’esclavage. Dans son ouvrage « Ma Loi d’avenir », elle imagine une société utopique sans oppression qui abolit l’esclavage.
  • Juliette Dodu (1848 – 1909) : Née à La Réunion, elle a utilisé ses ressources pour soutenir les esclaves en fuite et a été active dans la sensibilisation à l’abolition.
  • Jacques-Pierre Brissot (1754 – 1793) : Journaliste et homme politique, il fait partie des fondateurs la Société des Amis des Noirs.
  • Étienne Polverel (1740 – 1795) : Commissaire civil à Saint-Domingue, il collabore avec Sonthonax pour proclamer l’abolition dans les Caraïbes.
  • Léger-Félicité Sonthonax (1763 – 1813) : Il est l’un des premiers à proclamer l’abolition de l’esclavage dans la colonie de Saint-Domingue en 1793, avant même que la décision ne soit officielle en France.
  • Jules Michelet (1798 – 1874) : Historien et intellectuel, Michelet s’engage dans ces écrits pour l’abolition de l’esclavage.

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