Bataille de Chesapeake (1781) : la bataille décisive de la guerre d’indépendance des États-Unis !

Savez-vous qu’une bataille importantissime de la guerre d’indépendance américaine a été gagnée par la France contre les Anglais sans la présence des Américains ? Cela semble étonnant, et pourtant c’est vrai ! Ne sous-estimez jamais notre importance lors de ce conflit.

L’indépendance américaine et plus particulièrement, l’influence française, est un événement que l’on survole complètement dans notre scolarité.

Pourtant, quand vous parlez à des Américains calés sur leur histoire, vous êtes surpris de voir de la reconnaissance dans les yeux quand ils évoquent Lafayette, Rochambeau ou même Grasse.

Et cette reconnaissance vient notamment des faits d’armes français lors de la bataille de la baie de Chesapeake.

Car, comme le disait justement l’historien britannique, Michael Lewis : « Avant la bataille de Chesapeake, les États-Unis étaient une possibilité ; après la bataille de Chesapeake, les États-Unis étaient une certitude. ». L’historien naval Sir William James va dans son sens en la considérant comme la « bataille décisive de la guerre ».

Découvrons-là ensemble.

La situation américaine avant la bataille de la baie de Chesapeake

Je ne vais pas refaire tout l’historique de la guerre d’indépendance américaine, car cela serait trop long et je ne suis pas forcément au point sur le sujet. Mais, rappelons quand même les raisons du conflit et la situation militaire avant la bataille de la baie de Chesapeake qui a lieu le 5 septembre 1781.

La guerre a éclaté en 1775. Comme souvent avec les troubles violents, les pépettes ont leur importance. Les habitants des Colonies américaines, qui ne pensent rien devoir à un royaume où ils n’ont jamais mis les pieds, en ont assez des taxes.

En difficulté financière, notamment à cause de la guerre de Sept Ans dans laquelle ils ont mis fin à la Nouvelle France, les Britanniques se comportent comme tout gouvernement après un dérapage de ses finances : ils se vengent sur le peuple en leur volant leur argent via une imposition démesurée.

On retient souvent la Boston Tea Party et la révolte contre les taxes sur le thé, mais ce ne sont pas les seuls abus anglais. Des taxes sur le sucre et les timbres avaient précédé.

Mais, d’autres raisons peuvent aussi expliquer la révolte américaine comme le développement d’un sentiment d’identité américaine, une réaction face à la répression militaire et surtout, la colère face à l’absence de représentants américains au Parlement britannique. Un slogan fait alors fureur : « No taxation without representation. »

En 1775, vous avez les premières batailles de Lexington et Concord et un an plus tard, les États-Unis proclament leur indépendance, alors que les Anglais sont loin d’avoir dit leur dernier mot et d’avoir tiré leur dernier coup de fusil.

Le conflit devient même plus complexe autour de 1777-1778. Tous les pays qui préfèrent mettre des coups sur les caboches plutôt que de parlementer comme des délégués syndicaux s’y mettent. La France, l’Espagne ou les Provinces-Unies soutiennent les récents États-Unis, mais même sans jouer le chauvin, il faut être honnête : nous faisons tout le travail pendant que les amateurs de gouda et de paëlla sauvegardent juste leurs territoires. Mais bon, dès que l’on peut s’en prendre aux Anglais, nous sommes toujours les premiers à pointer notre museau !

Avec l’Angleterre, vous retrouvez les Québécois qui voient d’un mauvais œil l’agressivité d’un nouveau peuple collé à leur territoire. J’évoquerais peut-être un jour sur la chaîne la méconnue bataille de 1775 entre Américains et Québécois dans la ville de Québec. Elle s’est déroulée à un endroit que je connais très bien puisque je m’y balade régulièrement. Mais, c’est un peu complexe, certains Français canadiens prendront fait et cause pour les Américains par la suite.

 Les Anglais sont aussi soutenus par des territoires indépendants allemands. Toujours partant pour la manipulation, ils profitent aussi du désir légitime de liberté des esclaves pour les pousser à se battre pour eux.

Quant aux Indiens, ils sont répartis comme les filles durant les parties de football en cours de sport ; on en met quelques-uns dans chaque équipe.

Maintenant que les compositions sont connues, vous comprenez mieux pourquoi une bataille importante sans Américains a pu avoir lieu.

Pendant plusieurs années, les batailles se succèdent sans être décisives. Tout va changer en 1781.

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Les prémices de la bataille de la baie de Chesapeake

En 1781, l’amiral de Grasse a une mission digne d’un fourgon Brink’s, sauf que l’amiral ne sécurise pas du cash, mais de la nourriture. Nous, Français, sont comme ça ; nous ne rigolons pas avec la nourriture. Plus d’une centaine de navires contenant des épices, du cacao et autres denrées sont escortés par nos forces armées.

Mais, remplir les greniers français, c’est bien. Tuer des Anglais, c’est mieux. Donc, quand le comte de Rochambeau est informé qu’une grande partie des troupes britanniques se trouvent à proximité, ils ne demandent pas que tout le convoi accélère pour vite aller remplir les panses européennes. Il demande à l’amiral de Grasse de changer de cap, de délaisser sa mission d’escorte et d’aller embrocher de l’adversaire.

Je précise que le nombre de militaires est très loin de celui d’une bataille comme Trafalgar en 1805, où près de 50 000 hommes s’affrontaient. Là, ce sont plutôt quelques milliers de soldats, mais c’est logique : les effectifs engagés dans la guerre d’indépendance américaine sont relativement faibles. La meilleure preuve est le nombre de morts. Si l’on fait un calcul grossier et que l’on prend en compte les blessés qui finissent morts ou les prisonniers qui ne ressortiront pas des geôles tenues par les Anglais, vous êtes sur 50 000 morts environ durant les 8 années de conflit, soit 12 fois moins que la guerre de sécession américaine et 6 fois moins que la seule bataille de Verdun en 1916.

Les forces anglaises sont présentes à Yorktown, en Virginie, et ne sont donc pas très loin de Philadelphie ou même de New York. Yorktown se trouve près de l’entrée de l’estuaire de Chesapeake.

Les Anglais viennent de s’y installer après des batailles en Caroline et sont menés par Charles Cornwallis, un homme qui a probablement passé plus de temps dans les batailles qu’à table avec sa femme.

La stratégie inclut plusieurs groupes agissant de concert. Les Américains menés par George Washington et les Français menés par Rochambeau marchent jusqu’à Yorktown, tandis que la flotte de l’amiral de Grasse arrive par la mer et doit y parvenir en entrant dans l’estuaire. Une autre flotte, celle du comte de Barras, doit aussi venir depuis Newport, qui se trouve à proximité de Boston.

Depuis longtemps, les belligérants savent que la marine est prépondérante dans ce conflit et la bataille de la baie de Chesapeake va le confirmer.

La Bataille de la baie de Chesapeake : le déroulement

Les Anglais et les Français ont souvent dominé le Monde pour une raison : leur capacité à combattre. Donc, la petite stratégie est un secret de Polichinelle et les Anglais comprennent vite le plan des adversaires.

Ils ont bien saisi que les forces de Yorktown vont être soumises à une attaque conjointe. Appelé à la rescousse par Cornwallis, l’amiral anglais Samuel Hood se lance alors dans l’aventure. Il craint notamment pour la sécurité de New York et se dépêche. Ses vaisseaux sont vite renforcés par ceux de l’amiral Thomas Graves qui, supérieur hiérarchiquement, devient le maestro.

Ils ont vent des mouvements du comte de Barras et décident d’être les premiers à entrer dans l’estuaire de Chesapeake. Ce serait un avantage décisif. Et les Anglais y parviennent, ils arrivent sur place avant le comte de Barras.

Mais, si vous avez bien suivi, ils manquent un gus dans mon histoire. Enfin, plutôt un gus accompagné de 3000 autres. La flotte de l’amiral de Grasse a été encore plus rapide que les Anglais. Elle est déjà sur place.

Le fait drôle est que Français comme Anglais se retrouvent étonnés de se voir. De Grasse n’attendait pas de renforts anglais à ce moment-là et les Anglais ne pensaient qu’aux troupes du comte de Barras et s’imaginaient les devancer. Or, dans leur surprise, ils se trompent complètement et finissent par croire que De Grasse et Barras sont réunis.

De Grasse se dépêche de faire remonter les ancres pour positionner les navires en colonne sur l’eau. Selon quelques spécialistes, ce moment était une occasion en or pour Graves. Il aurait dû attaquer chaque navire avant qu’ils ne soient bien positionnés. Un par un, il aurait probablement pu les faire couler. Mais, les Britanniques ne sont pas très inspirés.

Pendant plusieurs heures, les navires sont proches sans se combattre. Puis, les Britanniques attaquent. Les Français ripostent avec une de leurs techniques favorites : viser les mâts et le gréement. C’est efficace puisque deux bateaux anglais sur les 19 engagés deviennent impossibles à manœuvrer.

Les Français et leurs 24 navires prennent l’initiative. Un officier de marine, et accessoirement grand explorateur que vous connaissez sûrement, Bougainville, envisage même un abordage. Le courage ne manque pas dans cette bataille !

Les vents changent et les Anglais finissent par reculer, mais les Français préfèrent rester en place plutôt que de s’exposer.

Tous les bateaux n’ont pas été engagés dans l’affrontement. Le nombre de morts est même faible. Les Français ont 220 morts et blessés, et les Anglais en comptent 336.

Mais, cela a suffi pour que la flotte anglaise soit bien endommagée.  Quand le soir, Graves fait un état des lieux, il réalise que 5 navires sur 19 sont inutilisables. Il tente de les faire réparer, discute avec Hood et n’entreprend pas d’offensives.

Les deux flottes se retrouvent donc à dériver pendant plusieurs jours, quittent l’estuaire et s’éloignent de plus en plus de Yorktown.

Puis, l’amiral de Grasse apprend que le comte de Barras arrive enfin et imagine une stratégie intelligente. Nous sommes plusieurs jours après l’affrontement et les Anglais ne savent toujours pas qu’il n’était pas présent lors de la bataille…

De Grasse décide de profiter de la nuit pour opérer un demi-tour et revenir dans la baie de Chesapeake, pour être aux côtés de la flotte de Barras, et se diriger vers Yorktown pour affronter Cornwallis.

Quant à Graves, il n’est pas dans les mêmes conditions. Il doit saborder un bateau qui n’est plus étanche et quand il apprend la manœuvre française, il réalise qu’il ne peut pas les poursuivre. Sa flotte est dans un état lamentable. Il n’a plus que 13 bateaux, alors que de Grasse en a encore 22, sans compter ceux du comte de Barras. Il est contraint de changer de stratégie et repart rapidement vers New York pour revenir plus fort.

Sauf, que la guerre n’attend pas les indécis ou les retardataires.

Cornwallis espérait voir Hood et Graves l’épauler à Yorktown, après avoir mis en déroute les troupes du comte de Barras. Finalement, ce dernier et de Grasse sont opérationnels, tandis que les navires anglais sont absents.

La baie est occupée par les Français. Les troupes à pied américaines et françaises sont arrivées et l’encerclement de Yorktown débute.

Les effectifs sont déséquilibrés : 11 000 Français et 9000 Américains, contre 5 000 Britanniques et 3000 Allemands. Oui, vous avez bien entendu les nombres. Il y a plus de Français que d’Américains. Comme je l’ai dit avant, notre rôle dans cette guerre d’indépendance, où plus de 2000 de nos compatriotes sont morts, est tout sauf anecdotique.

Esseulé à Yorktown, Cornwallis ne peut pas faire de miracle. Le siège de la ville fonctionne. Il finit par capituler le 19 octobre 1781. 7 000 Anglais sont faits prisonniers. C’est une catastrophe.

Et fait aussi frustrant pour les Anglais que notre Grouchy à Waterloo, Graves réussit à repartir de New York avec 25 navires prêts à combattre. Mais, ce départ se fait après la capitulation et ne sert à rien…

Donc, pour résumer, la bataille de Chesapeake n’est pas une énorme boucherie, mais sans elle, la bataille de Yorktown n’aurait pas été la même et rien ne certifie que les Anglais l’auraient perdu.

L’historien militaire Russell Weigley le résume bien : « La bataille de la Chesapeake n’a été qu’une victoire tactique pour les Français, mais elle a été une victoire stratégique pour les Français et les Américains qui a scellé l’issue principale de la guerre. »

Deux ans plus tard, le 3 septembre 1783, le traité de Paris met fin à la guerre et les États-Unis s’assurent de leur indépendance, bien aidés, et il faut toujours le rappeler, par la France !

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