Saint-Louis était-il vraiment saint ? La question n’est pas bête, non ? Pour prouver que Louis IX mérite son titre Saint-Louis, je vais vous présenter tous les critères qui ont permis d’appeler ainsi ce roi de France du XIIIe siècle.
La sainteté de Saint-Louis en vidéo !
Durée de la vidéo : 20 minutes
Saint-Louis s’appelle ainsi… car il est canonisé !
Tout d’abord, Saint-Louis n’est pas un surnom, mais un fait. Louis IX que l’on surnommait plutôt « le Prudhomme » durant son règne a été canonisé peu de temps après sa mort.
Pour ceux qui ne connaissent pas la définition, et il n’y a jamais de honte à ne pas savoir, canoniser est tout simplement le fait de reconnaître une personne comme saint ou sainte.
La mère de Jésus, Marie, est la sainte la plus connue. Mais, en réalité, il y a des milliers de saints. Souvent, ce sont des religieux, mais il y a aussi des personnes qui ont réalisé des miracles ou qui ont été des martyrs.
Tout un dossier est monté pour justifier la canonisation d’une personne. Ce n’est pas un titre dévoyé comme la Légion d’honneur. Personne ne l’obtient pour une faveur politique ou une coupe du Monde. La personne canonisée doit avoir un comportement de chrétien exemplaire. Le titre n’est décerné par le Pape qu’après la mort du saint. Cela peut être arrivé quelques années après ou bien plus tard.
Par exemple, j’habite au Québec et la sainte Marie de l’Incarnation morte en 1672 à Québec n’a été canonisée qu’en 2014, soit près de 4 siècles après !
Pour le royaume de France, voir le pape canoniser son ancien roi est à la fois une fierté et un concours du « Qui est le plus pieux ? ».
Dès la mort de Louis IX, de premières démarches sont faites. La famille royale pousse, et l’Église de France l’imite. Le soutien des ordres mendiants, qui ne sont pas des clodos réunis en groupuscule, mais un ordre religieux qui vit de la charité et prône la pauvreté, est également dans le coup. Louis IX les a tellement aimés et aidés que ces religieux le chérissent.
Quant au confesseur officiel de Louis IX, Geoffroy de Beaulieu, il présente des preuves qui serviront à établir sa sainteté. Les critères de sainteté que j’évoque après ont été abordés par de Beaulieu.
Mais, la canonisation met un peu plus de temps que prévu. Plusieurs papes se succèdent. Tout se dénoue quand Boniface VIII devient officiellement pape. Il veut plaire à Philippe le Bel, le petit fils de Louis IX. Le 4 août 1297, Louis IX est canonisé et devient officiellement saint. La rapidité de sa canonisation, même pas trois décennies après sa mort, est rare.
Pour la petite histoire, Philippe le Bel ne sera pas reconnaissant longtemps envers le pape. En effet, il sera en conflit ouvert avec Boniface VIII, au point de l’humilier et de le faire arrêter. Philippe le Bel est également le responsable de l’anéantissement du célèbre ordre militaire et religieux : les Templiers.
Comme évoqué précédemment, Louis IX ne pouvait pas être canonisé uniquement parce qu’il avait été un bon roi de France et que le pape voulait faire plaisir à Philippe le Bel. Il a fallu de vrais arguments et il n’en manquait pas.
Aucun roi de France n’a été aussi dévot et humble. Nos Présidents actuels sont heureux de dépenser vos impôts au château de Versailles et d’y inviter des célébrités étrangères qui n’ont rien à voir avec la conduite de l’État. Saint Louis soignait des moines lépreux et servait à manger aux pauvres !
Je vous raconte tout ça dans quelques secondes.
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Louis IX est un chrétien modèle… et en fait même trop !
Il est impossible d’être un Saint si vous n’êtes un chrétien que le dimanche. La religion signifiait tout pour Saint-Louis.
Saint-Louis n’est pas comme un Henri IV capable de changer de religion comme de caleçon. Sa foi est sincère. Il prie très souvent, réalise des pèlerinages, étudie les écritures…
Sa charité est mise en avant. Il ne se contente pas de balancer une pièce aux gueux quand il sort de la messe. À chaque repas, il accueille plusieurs pauvres et les nourrit parfois lui-même.
Quand il se rend dans les monastères, il ne fait pas que se prosterner devant Dieu. Il est l’égal des frères et se met à leur service. Il choque même, car il souhaite laver les pieds des autres. Mais, après tout, Jésus ne l’a-t-il pas fait avec ses apôtres ? Si le Fils de Dieu le faisait, le Roi de France ne peut pas être trop grand pour le faire !
Il choque aussi quand il aide les lépreux. Ces malheureux étaient souvent relégués à l’arrière de la société. Un mendiant au Moyen-Âge, il est ignoré s’il ne gêne pas et il reçoit un coup de pied s’il cuve dans le passage. Un lépreux, vous l’enfermez dans le grenier avec l’interdiction de mettre son nez purulent dehors ! Leur maladie faisait peur et personne ne voulait l’attraper.
Pourtant, le futur Saint-Louis visite régulièrement un moine lépreux de l’abbaye de Royaumont. Il lui baise la main, lui donne à manger et essuie le pus qui coule.
Donc, si vous tombez malade, vous n’avez pas besoin de votre femme ou d’une aide-soignante, mais d’un Saint-Louis !
Bien évidemment, ce comportement où la piété et la modestie sont érigés en règle de vie ne peut pas s’accompagner d’un roi qui vit dans le luxe. Un vrai changement opère quand Louis IX revient de sa première croisade. Après avoir frôlé la mort, il prend conscience qu’il doit être un chrétien sans reproche et qu’il ne fait pas assez pour l’être.
Dès lors, il réduit au maximum son train de vie. Il s’habille sobrement et ne commet pas d’excès, que ce soit à table ou avec les femmes.
Le roi se montre pudique comme une épouse de taliban. Son chambellan, Pierre de Laon, ne l’a jamais vu se dévêtir devant lui. Même une jambe ou un bras entier n’est montré que pour les célèbres et inefficaces saignées.
La tradition fait de Louis IX un roi fidèle à sa femme, Marguerite de Provence. C’est presque un exploit puisque les rois n’avaient pas tendance à multiplier les pains comme Jésus, mais les bâtards.
Rapidement, je glisse aussi que Saint Louis effectue un gros travail pour améliorer la justice en France. Il ne souhaite pas que les riches soient protégés au détriment des pauvres. Certaines de ces décisions vont créer des remous parmi les seigneurs.
En 1259, Enguerrand de Coucy pend trois jeunes qui chassaient dans ses bois. Saint-Louis exerce la justice. Il le condamne à une énorme amende et l’oblige à partir en croisade pour trois ans. Il exige aussi que de Coucy fasse construire deux chapelles dans laquelle seront dites des prières pour l’âme des jeunes qu’il a fait pendre.
Ce souhait d’être plus chrétien qu’un apôtre de Jésus tourne parfois au danger. Si Louis VI a été surnommé Louis le Gros, Louis IX aurait pu s’appeler Louis le Maigre. Son ascétisme rend ses assiettes plus vides que les nôtres aujourd’hui en plein carême. Et quand manger peu ne suffit pas, il jeûne.
Il se montre également un peu trop généreux en flagellations. Il pratique de véritables séances durant lesquelles son confesseur lui donne la discipline. Vous imaginez la scène. À deux dans la chambre du roi, le tout-puissant roi du royaume de France se fait violenter par son confesseur. Pour vous, cela s’appelle peut-être une séance de sadomasochisme. Pour Louis IX, c’était un rapprochement avec Dieu.
Le roi porte parfois le cilice. Il s’agit d’un vêtement rugueux au point de faire souffrir la personne qui le porte. Un cilice porté par Saint-Louis est devenu une vraie relique et se trouve aujourd’hui dans l’église Saint-Aspais de Melun.
En termes de confort, il n’est jamais contre une petite innovation. Il possède un lit portatif en bois sans paille. Il le trimballe durant ses déplacements, car il est hors de question de dormir sur un support trop confortable.
Amaigri, flagellé, après une assiette moins garnie que celle d’un restaurant gastronomique, le roi se dit que dormir sur un matelas rembourré serait un acte orgueilleux ! Il préfère se faire mal au dos en dormant sur du bois.
Enfin, j’attaque la critique la plus souvent émise envers Saint-Louis : les mesures prises contre les Juifs ne lui font pas honneur. Il serait anachronique de dire qu’il était antisémite. Mais une chose est sûre : il ne veut pas que ce peuple entache la France.
Il affuble les Juifs de signes distinctifs. Le port imposé de la rouelle n’a rien à envier à l’étoile jaune des années 40. Des Talmuds sont également brûlés en public et leur fameux travail d’usurier, avec des taux proches du vol, est fortement limité.
Toutefois, il n’y a pas de massacres de juifs et j’ai envie de dire que s’en prendre aux Juifs n’était pas un argument valable pour lui refuser la sainteté. Au XIIIe siècle, s’en prendre aux hérétiques et aux Juifs, qui sont ceux qui avaient à raison jusqu’au jour où ils n’ont pas suivi Jésus, est bien vu par la papauté. Ce serait donc plutôt un bon point pour sa canonisation.
Louis IX soutient l’église et les religieux
Continuons avec des comportements plus consensuels : son soutien aux ecclésiastiques. Saint-Louis ne peut être un chrétien exemplaire sans prendre soin de l’Église et des églises.
Il aide financièrement de nombreux ordres religieux et leur offre des abbayes. Il fait également construire des édifices magnifiques et/ou très utiles.
Un bon exemple est l’hospice des Quinze-Vingts. En 1260, sa construction permet d’accueillir des aveugles pauvres.
Mais, la plus célèbre construction décidée sous Louis IX est la Sainte-Chapelle présente sur l’île de la Cité. Sa construction est un petit miracle puisqu’elle a été réalisée en 7 ans seulement.
Elle a été érigée pour abriter des reliques achetées à prix fort par Saint Louis. Le roi était capable de s’habiller en mendiant et de manger un plat cuisiné Lidl pour limiter les dépenses, mais il ne fallait pas le laisser dans une vente aux enchères de reliques, car il pouvait vous vendre l’Auvergne pour un poil de Jésus.
Comme un rentier peu scrupuleux, il profite de la difficulté financière des autres pour créer son patrimoine. L’empereur latin de Constantinople n’est plus riche comme par le passé.
Louis IX lui rachète alors l’une des plus importantes reliques possibles : la Sainte Couronne. Il met sur la table près de la moitié des revenus annuels du royaume. Mais, la Sainte Couronne n’est pas une couronne en papier utilisée lors de la galette des Rois. Il s’agit de la couronne en épines portée par le Christ avant sa crucifixion.
Quand Saint-Louis la voit pour la première fois, lui et sa mère, Blanche de Castille, se prosternent. L’émotion les envahit comme s’ils avaient remporté l’EuroMillions.
Cette relique est désormais dans la cathédrale Notre-Dame de Paris et nous devons remercier chaudement les pompiers et l’abbé Jean-Marc Fournier pour son sauvetage lors de l’incendie de la cathédrale en 2019. En plus de la Sainte Couronne, l’abbé a également mis à l’abri la chemise de Saint-Louis.
La Sainte Couronne est la relique la plus célèbre acquise par Saint-Louis, mais elle est loin d’être la seule. Posséder autant d’objets saints permet de prouver que la France est un royaume au « service de Dieu. »
Pour la petite histoire, Saint Louis deviendra lui-même un créateur de reliques à sa mort…
En effet, quand il meurt à Tunis en 1270, son corps passe à la marmite. Pour les contemporains, les os comptent plus que la peau vouée à disparaître. On bouillit le corps du roi mort jusqu’à ce que la peau se sépare des os, puis on ramène les os en France. Les successeurs vont alors offrir des os du roi saint en guise de cadeaux politiques. Une côte de Saint-Louis ira à un endroit, tandis qu’une autre fera le chemin inverse. Cette répartition des os est choquante et mériterait son article. Peut-être que je la traiterais un jour sur le site.
Mais, revenons-en au sujet initial : la sainteté de Saint-Louis. Nous avons déjà vu qu’elle était le résultat de son comportement exemplaire, son travail pour promouvoir la religion et le rapatriement de reliques.
Il me reste deux points que je souhaite mettre en avant : les croisades et ses miracles. Car oui, même s’il n’est pas Merlin l’enchanteur, Louis IX a réalisé des miracles. Enfin, ce sont plutôt ses restes !
La participation aux croisades de Saint-Louis
Vous avez obligatoirement entendu parler des croisades. Le premier but des croisades est de faire un petit pèlerinage en Terre sainte. Les vilains arabes de l’époque de la première croisade sont devenus tolérants comme Daech et les chrétiens ne sont plus les bienvenus.
Pour leur montrer qui a la plus grosse croix, ce ne sont pas des scouts en shorts et drapeaux qui débarquent, mais de gros chevaliers avec épées et étendards. Ils veulent prier au Saint-Sépulcre, le lieu du tombeau du Christ. Pour y parvenir, ils sont prêts à découper tous les infidèles récalcitrants.
Les croisades vont évidemment évoluer au fil du temps. Des périodes de paix vont alterner avec de nouvelles croisades guerrières, et la réponse au jeu simpliste de « Qui est le méchant ? » dépendra des années…
La croisade de Saint-Louis est la 7e et survient en 1248. Les musulmans ont repris Jérusalem en 1244. Le roi de France apprend cela alors qu’il est très souffrant et craint de mourir. Il jure de partir en croisade si Dieu lui accorde la guérison.
Dieu semble partant pour voir le roi sortir son épée face aux hérétiques puisqu’il lui permet de se remettre sur pied.
Évidemment, un roi aussi pieux ne va pas revenir sur sa parole. On ne ment pas à Dieu. Même sa mère qui essaie tout pour le faire changer d’avis ne réussit pas.
La préparation de la croisade nécessite une hausse d’impôts et la construction d’un magnifique port à Aigues-Mortes. Vous pouvez revivre un peu cette épopée en visitant aujourd’hui cette ville du Gard.
La première croisade de Saint-Louis résumée briévement
Louis IX et la vingtaine de milliers de croisés embarquent en août. Le projet est de débarquer en Égypte et de remonter vers la Palestine. Il ne faut jamais oublier qu’à cette époque, vous n’avez pas un GPS. Les bateaux n’arrivent pas précisément à l’endroit visé et une fois sur place, vous galérez pour trouver votre chemin. En plus, les quelques cartes géographiques ne sont pas précises. Les croisés ne savent probablement pas que leur plan nécessite un millier de kilomètres pour arriver jusqu’au but.
Partir en croisade est donc plus téméraire que courageux ! Mais bon, quand Dieu est avec vous, vous ne craignez rien, pas même la mort. En Égypte, les croisés récupèrent vite Damiette… avant de perdre. Le roi est capturé, puis libéré contre une grosse rançon. Il impressionne les Musulmans par sa religiosité.
Libre, il ne repart pas en Europe tout de suite et reste plusieurs années sur place. Il souhaite resolidifier la présence chrétienne en Terre sainte, même s’il ne réessaie pas de prendre Jérusalem. Après avoir appris la mort de sa mère, il rentre en 1254.
En toute honnêteté, cette croisade est un échec. Mais, cela reste un bon point en vue de la canonisation. Louis IX a risqué sa vie pour récupérer la Terre sainte.
Il va même mourir 16 ans plus tard en essayant une nouvelle tentative. Cette croisade ressemble presque à un dernier tour d’honneur. Le roi n’est pas en bonne santé. Mais, il veut probablement finir sur une bonne note en convertissant les païens.
Le choix ne se porte pas sur la Terre sainte, mais sur la Tunisie. Il suffit de franchir la mer Méditerranée en quelques coups de rames pour découper les vilains qui résistent et finir au Paradis.
En plus, Louis IX commet une erreur souvent commise par les Chrétiens avec les Musulmans : croire qu’on peut les convertir facilement. Il imagine pouvoir faire embrasser la foi chrétienne à l’émir de Tunisie.
Mais, à peine arrivés, les croisés subissent des épidémies. Le prince Jean Tristan, l’un des fils de Saint Louis, meurt. Le roi le suit trois semaines plus tard. Louis IX meurt le 25 août 1270 à Carthage.
Pendant longtemps, sa mort a été attribuée à une épidémie de typhus ou au scorbut. Les dernières études s’orientent désormais exclusivement vers le scorbut.
Une trêve est signée avec les musulmans et le corps de Saint-Louis est rapatrié vers le royaume. Il arrive à Paris qu’en mai 1271.
Mais sur le chemin, il a réalisé une chose importantissime pour l’argumentaire de sa canonisation : des miracles !
Toutefois, je précise que sa mort en début de croisade ne suffira pas à son entrée parmi les « saints martyrs ». Mais bon, saint, c’est déjà pas mal, non ?
Les miracles de Saint-Louis… mort !
Les miracles prétendus de Saint-Louis sont essentiellement des guérisons. Une soixantaine de miracles sont racontés. Ils ont tous lieu après sa mort et commencent sur le parcours du rapatriement, dès l’Italie.
Ainsi, un enfant qui souffrait d’une grosseur anormale que personne ne pouvait soigner est autorisé à toucher la châsse contenant les os de Louis IX. La grosseur pète d’un coup et le pus en coule. Sur le papier, c’est certifié « miracle ». Si vous ne croyez pas aux miracles, je pense que l’argument du gros bouton qui finit par péter tout seul peut tenir.
Alors que les os reposent à Saint-Denis, les récits miraculeux s’enchaînent. Le gratin des mendiants et des infirmes veut tenter sa chance de guérir… Des courbés se redressent, des muets reparlent, des fistules s’éclatent, des boiteux remarchent. Saint-Denis n’est plus une basilique, c’est un film Disney.
Je crois que seul Saint-Louis pourrait désormais nous solutionner le fameux trou financier de notre Sécurité Sociale actuelle. Comment ? En filant un fragment d’os à chaque malade pour qu’il guérisse.
Notre seul roi de France déclaré saint a donc tout fait pour mériter sa canonisation.
Désormais, vous savez que c’est sa piété et sa dévotion, sa soif de justice, sa charité, ses croisades et ses miracles posthumes qui lui ont valu ce titre de Saint-Louis.
Je vous remercie de votre lecture !
Article écrit par Denis
Créateur de la Tête Haute Française, je partage mon amour de l’Histoire de France sans prétention, en essayant de la rendre amusante (même si je sais que cet humour ne sied pas à tout le monde).